Agile Innovation 2015

Agile Grenoble est une journée de conférences sur l’agilité. Pour marquer notre entrée dans l’agilité l’an dernier, l’entreprise avait envoyé tout·e·s ses salarié·e·s assister à cette journée, que j’ai personnellement trouvée très intéressante. Cette année, je m’y suis prise trop tard pour demander à y aller et il n’y avait plus de place sur la journée. En revanche, un collègue impliqué dans l’association organisatrice m’a donné une place pour venir à la journée Agile Innovation, qui a lieu le lendemain de la journée de conférences.

Cette journée, en comité plus restreint, se présente sous la forme d’un open space ou forum ouvert : le programme n’est pas défini à l’avance mais se construit en début de journée en fonction des envies et des propositions des participant·e·s. Concrètement, après quelques jeux pour briser la glace, on nous a proposé d’écrire sur des feuilles A4 un sujet dont nous aimerions discuter, puis de coller celles-ci sur un grand tableau, dans l’espace correspondant à l’un des créneaux de 50 minutes et l’un des emplacements dans la pièce (7 espaces en parallèles). Pour proposer un sujet, nul besoin d’être expert·e de celui-ci. La personne qui propose sera uniquement chargée d’animer le groupe de discussion.

Place de l’individu dans l’agilité

Le premier sujet dont je suis allée discuter était celui de la place de l’individu dans l’agilité. Discussion à bâtons rompus dans un petit groupe de 5 personnes, sur la manière de gérer des individus qui n’adhèrent pas à scrum et/ou qui ne s’intègrent pas bien dans les équipes, dérivant ensuite sur la manière de susciter le changement dans une entreprise ou auprès d’individus attachés à leurs habitudes.

Bonnes pratiques pour les tests fonctionnels

J’ai ensuite rejoint un groupe abordant les tests fonctionnels manuels, avec la question « Quelles bonnes pratiques pour livrer un produit de qualité sans trop surcharger les développeurs/ses avec les tests ? ». La personne qui animait l’atelier expliquait que dans son entreprise, les tests ne sont pas faits par les développeurs/ses mais par les Scrum Masters et Product Owners. D’autres participant·e·s ont insisté sur l’intérêt de faire tester le produit par des testeurs/ses professionnel·le·s, qui évaluent le produit dans des conditions réalistes (débit mauvais, appareil peu puissant…) voire extrêmes (tests de performance, stress tests, tests de mémoire). Pour ma part, j’ai détaillé les tests que nous faisons dans mon entreprise :

  1. Tests de validation de la User Story, intégrés à la Definition of Done :
    • Tout code non graphique a un test unitaire associé.
    • Le code a été revu par quelqu’un d’extérieur à la story.
    • Le plan de test a été mis à jour avec des lignes correspondant à tous les éléments de la story.
    • Cette partie du plan de test a été testée sur tous les appareils et navigateurs supportés par quelqu’un d’extérieur à la User Story.
  2. Tests de validation de l’incrément avant le Sprint Review : le plan de test est déroulé sur tous les appareils et navigateurs supportés, par l’ensemble de l’équipe de développement.
    Note : Nous considérons qu’il est vraiment important que l’équipe de développement teste son propre produit. Cela lui permet de se rendre compte de la détérioration de l’expérience utilisateur que les bugs et imperfections génèrent.
  3. Tests utilisateurs :
    • Test des nouvelles fonctionnalités en fin de Sprint Review par les personnes présentes non impliquées dans le développement (Product Owner, chefs de projets, CEO…) : réalisée pour la première fois lors de notre dernier Sprint Review, cette pratique a été très bien accueillie.
    • Test de l’intégralité du produit chez des utilisateurs « naïfs » : dans le cadre de mon travail d’UX designer, je teste nos produits le plus régulièrement possible sur des sujets qui voient nos produits pour la première fois.

Pendant la pause déjeuner, j’ai discuté avec différentes personnes dont une qui m’a orientée vers la ressource suivante qui complète bien le sujet des tests :

octo-technology-refcard-tests-web-frontend-1-1024
Source : https://fr.slideshare.net/fpetitit/octo-technology-refcard-tests-web-frontend?from_action=save
octo-technology-refcard-tests-web-frontend-2-1024
Source : https://fr.slideshare.net/fpetitit/octo-technology-refcard-tests-web-frontend?from_action=save

Entreprise libérée, et après ?

En début d’après-midi, je suis allée dans un atelier intitulé « Entreprise libérée, et après ? » pour essayer de comprendre les limites de ce modèle. Le responsable de l’atelier nous a raconté avoir discuté avec une personne travaillant dans le service marketing d’une entreprise libérée, et avoir été étonné de son amertume, en particulier son sentiment de ne pas pouvoir évoluer. Cette discussion nous a permis de discuter de la place du middle management dans les entreprises libérées et dans l’agilité, ainsi que du fait que l’évolution dans l’entreprise passe souvent dans notre culture par une progression dans la hiérarchie. Il me semble que la progression des compétences et de l’expertise dans un domaine n’est pas assez valorisée dans les esprits et dans les salaires.

Techniques de facilitation

Je suis ensuite allée dans un atelier pour découvrir une technique de facilitation de réunions et de discussions en général : la règle des doigts. L’idée est de simplifier les prises de parole en assemblée, en priorisant celles-ci en fonction de la pertinence du propos (même sujet vs. nouveau sujet) et de l’ordre des envies de prise de parole plutôt qu’en fonction de la puissance vocale. Concrètement, 7 gestes sont à retenir, 4 pour prendre la parole et 3 pour émettre un avis :

  1. Auriculaire levé : j’ai une intervention technique à faire (ex : « Est-ce qu’on peut ouvrir la fenêtre ? » « Les plateaux repas sont arrivés »…).
  2. Pince entre l’index et le pouce : j’ai une intervention humoristique à faire.
  3. Deux doigts levés : j’ai une intervention sur le sujet à faire.
  4. Index levé : j’ai un nouveau sujet dont je veux parler.
  5. Pouce en l’air : je suis d’accord.
  6. Pouce en bas : je ne suis pas d’accord.
  7. Trois doigts levés : cela fait trop longtemps que nous parlons de ce sujet, passons au suivant.

La personne qui facilite la discussion donne la parole aux un.e.s et aux autres selon l’ordre de priorité (1 à 4), et l’ordre des levés de doigts. Les interventions techniques sont rapides, on les évacue au plus vite. Les interventions humoristiques ne fonctionnent qu’en contexte, néanmoins le ou la facilitateur/trice décidera de donner ou non la parole à la personne qui veut faire une blague selon l’intensité du débat. Viennent ensuite les interventions sur le sujet, qui se feront dans l’ordre dans lequel les personnes ont levé leurs doigts. Enfin, quand plus aucun geste n°1 à 3 ne sera visible (ou quand trop de gestes n°7 seront présents), on donnera la parole aux personnes voulant parler d’un autre sujet. Pour que cette technique de facilitation fonctionne efficacement, il faut que les gestes soient parfaitement maitrisés de tous (un poster sur le mur peut les rappeler) et que chacun écoute et respecte l’animateur/trice de la réunion.

L’explication de la règle des doigts n’ayant pas duré 50 minutes, nous avons ensuite partagé d’autres techniques de facilitation ou ice-breaker, utilisables en particulier en Sprint Retrospective. Idées en vrac :

  • Se mettre debout en cercle et avancer ou reculer d’un ou deux pas selon qu’on se sent bien, très bien, pas bien ou vraiment pas bien. Symboliquement, l’équipe se retrouvera très proche si tout le monde se sent très bien, et très éloignée si tout le monde se sent très mal.
  • Proposer aux participants de choisir une carte du jeu Dixit (cartes très esthétiques qui peuvent évoquer de multiples choses) ou du set de cartes proposés par Visuals Speak pour évoquer comment ils se sentent, comment ils se représentent dans le projet, comment ils ont vécu la réunion… Demander ensuite au groupe d’essayer d’expliquer les choix de carte de chacun·e, ou à chacun·e d’expliquer sa propre carte.
  • Demander à chacun·e de raconter quelque chose qui l’a fait sourire depuis le matin.
  • Demander à chacun·e de dessiner le projet, selon son point de vue.
  • Distribuer des rôles avec un objectif à chaque participant·e : gardien du temps, garant du fait que l’on sorte avec une décision, etc. Les objectifs de chacun·e peuvent être connus de tous ou gardés secrets.
  • Faire un dessin collectif au fur et à mesure des échanges pendant la discussion : outil puissant de reformulation visuelle.
  • Exprimer les idées sur des post-its que chacun·e colle au mur, puis chaque participant·e vient expliquer un post-it, le sien ou celui de quelqu’un d’autre.
  • Demander à chacun·e d’expliquer ce qu’il ou elle attend de la réunion, et revenir dessus à la fin en demandant si la réunion a répondu aux attentes.
  • Demander à chacun·e d’écrire sur des post-its ce qu’il ou elle attend du projet et ce qu’il ou elle apporte au projet (ou à l’équipe) et les afficher au mur. S’intéresser au ratio « J’attends » sur « J’apporte » : un résultat très supérieur à 1 est un signal d’alarme à ne pas négliger.
  • Demander à chaque participant·e d’énoncer une qualité de quelqu’un d’autre, ou de présenter quelqu’un d’autre : exercice puissant pour rassembler les gens, créer un esprit d’équipe.

Échangeons des chaudoudoux !

Le conte chaud et doux des chaudoudoux - Claude Steiner
Le conte chaud et doux des chaudoudoux – Claude Steiner

Pour terminer la journée en douceur, je suis allée à l’atelier des chaudoudoux. Je connaissais Le conte chaud et doux des chaudoudoux de Claude Steiner (illustré par Pef, magnifique) inspiré de l’analyse transactionnelle, mais pas l’exercice associé.

Pour se mettre dans le bain, l’animateur de l’atelier nous a demandé de nous raconter, deux par deux, nos trois derniers kiffs. Trois évènements qui nous ont procuré beaucoup de joie : souvenir de mes dernières vacances, soirée concert dans mon appartement et stimulation intellectuelle à la dernière conférence où je suis allée (article à venir) pour ma part.

Ensuite, le concept est très simple. En déambulant tout·e·s, un bloc de post-its à la main, nous écrivons des choses gentilles (i.e. des strokes positifs en analyse transactionnelle) sur les personnes qui nous entourent, et nous leur collons dans le dos. Quand plus personne n’écrit, on s’arrête, on récupère les post-its dans notre dos (un coup de main est bienvenu) et on les lit en souriant bêtement. Dans un contexte comme celui-ci où les gens ne se connaissent pas particulièrement (j’avais croisé certain·e·s sur des ateliers dans la journée mais pas plus), cela permet de connaître les aspects positifs de l’image que nous donnons à des inconnu·e·s. Plus globalement, cela renforce la confiance en soi et met de bonne humeur. À refaire !

Jeu des cubes : étude du comportement d’engagement

Enfin, avant la conclusion de la journée, j’ai observé des gens jouer à un jeu permettant d’étudier les comportements liés à la prise d’engagement. Les 5 joueurs devaient construire chacun une tour avec des petits cubes en une minute, et prédire à l’avance combien de cubes ils seraient capables d’empiler. Après quelques itérations, l’animateur leur a demandé de s’engager en tant que groupe sur un nombre de cubes total pour l’ensemble de 5 participants. À la fin de chaque essai, il leur demandait comment ils avaient vécu l’exercice, et pourquoi ils avaient ou non continué à empiler des cubes alors que l’objectif avait été atteint. Divers comportements ont pu ainsi être mis en évidence :

  • Celui qui ne supporte pas de ne pas remplir son objectif – donc préfère s’engager sur une valeur plus faible – mais ne va pas au-delà de l’objectif qu’il s’est fixé.
  • Celui qui s’amuse une fois son objectif atteint, en mettant en place un projet personnel.
  • Celui qui est très ambitieux, et prêt à faire plus pour l’équipe si certains membres ont peur de ne pas réussir leur part du marché.
  • Celui qui construit une deuxième tour une fois que son objectif est rempli, au cas où l’un de ses partenaires ferait tomber la sienne.
  • Etc

J’ai trouvé ce jeu très intéressant comme révélateur de personnalités. Il n’y a pas de bons et de mauvais comportements, juste des comportements différents selon les individus, dont il faut être conscient. D’autre part, quand l’animateur leur a dit explicitement qu’ils avaient le droit de communiquer entre eux pendant la construction, les joueurs sont devenus plus détendus dans la tentative suivante. Une meilleure transparence sur la progression du travail s’est donc avérée bénéfique sur le stress des personnes impliquées, même à une échelle aussi faible que celle-ci.

Plus de détails sur ce jeu dans cet article de blog de d’Alexandre Boutin qui animait l’atelier, mentionnant notamment que ce jeu est issu de l’analyse transactionnelle, décidément !

Conclusion

Cette journée a été riche en rencontres, en échanges et en enseignements. J’ai pioché plein de bonnes idées et je sors de là avec le sentiment de faire partie de quelque chose de plus grand, d’une communauté. Un grand merci à Johan qui m’a permis d’assister à cette journée !

 

 

 

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